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Cameroun : Paul Biya réélu avec 53,66 % des voix, un huitième mandat sous tension

Libreville, Mardi 28 Octobre 2025 (Infos Gabon) – Le Conseil constitutionnel du Cameroun a proclamé, lundi, les résultats officiels de l’élection présidentielle du 12 octobre dernier. Sans grande surprise, le président sortant Paul Biya a été déclaré vainqueur avec 53,66 % des suffrages exprimés, devançant son principal adversaire, Issa Tchiroma Bakary, crédité de 35,19 % des voix.

À 92 ans, celui que ses partisans surnomment le « sphinx d’Etoudi » prolonge un règne entamé il y a plus de quarante ans, en novembre 1982, lorsqu’il succéda à Ahmadou Ahidjo. Cette nouvelle victoire lui assure un huitième mandat consécutif à la tête de la République du Cameroun, un record inédit en Afrique centrale.

Un scrutin sous haute tension

L’annonce du président du Conseil constitutionnel, Clément Atangana, n’a pas apaisé les esprits. Dès la publication des résultats en milieu de journée, des manifestations spontanées ont éclaté dans plusieurs quartiers de Douala, bastion traditionnel de l’opposition. Des groupes de jeunes, scandant des slogans hostiles au pouvoir, ont tenté d’organiser des rassemblements avant d’être rapidement dispersés par les forces de l’ordre.

Des affrontements ont été signalés à Bépanda, Bonabéri et Akwa, où des barrages de fortune ont été érigés avant d’être démantelés dans l’après-midi. Selon plusieurs sources locales, la tension restait palpable jusque dans la soirée.

Les autorités ont renforcé le dispositif sécuritaire autour des principaux bâtiments publics, notamment la préfecture de Douala, les locaux de la CRTV (télévision nationale) et certains commissariats.

À Yaoundé, la capitale, l’atmosphère est restée plus calme, même si des forces antiémeutes ont été déployées à des endroits stratégiques. Les médias d’État ont largement relayé les félicitations adressées au président Biya par ses partisans, mettant en avant la « victoire de la stabilité ».

Une opposition divisée et fragilisée

Face au président sortant, Issa Tchiroma Bakary, ancien ministre de la Communication, a réalisé une percée inattendue, avec plus de 35 % des voix selon les chiffres officiels. Son discours de campagne, centré sur le renouveau générationnel, la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption, a séduit une partie de la jeunesse urbaine, notamment à Douala et à Garoua.

Pourtant, cette dynamique n’aura pas suffi à inverser le rapport de force, dans un contexte marqué par une faible participation électorale et une opposition divisée. Plusieurs leaders historiques, tel que Maurice Kamto ne s’est pas présenté.

Le poids de l’âge et les défis à venir

À 92 ans, Paul Biya reste l’un des chefs d’État les plus âgés du monde. Sa longévité politique fascine autant qu’elle interroge.
Ses opposants pointent un état de santé fragile et une présence publique de plus en plus rare, laissant une large place à son entourage et à certains caciques du régime.

Pour ses partisans, cette réélection consacre la continuité d’un homme d’expérience, garant de la stabilité dans un pays confronté à de multiples crises : insécurité dans les régions anglophones, tensions sociales persistantes, chômage élevé, et ralentissement économique.

Mais pour une partie de l’opinion, cette nouvelle victoire ouvre aussi une période d’incertitude. Car la question de la succession de Paul Biya demeure entière. Les rumeurs d’un transfert de pouvoir à des figures proches du clan présidentiel alimentent les débats, tandis que la scène politique camerounaise reste en quête d’un véritable renouveau.

Une victoire amère

Cette victoire, bien que légale, laisse un goût amer pour une partie des Camerounais. Elle symbolise à la fois la résilience d’un pouvoir solidement enraciné et la fragilité démocratique d’un pays où l’alternance politique semble toujours hors de portée.

Pour Paul Biya, ce nouveau mandat pourrait être le plus complexe de son long règne : celui de la transition générationnelle, de la réconciliation nationale et de la relance économique. Mais pour ses détracteurs, le Cameroun vient de s’enfermer un peu plus dans une forme d’immobilisme institutionnalisé, où le changement reste une promesse différée.

FIN/INFOSGABON/SO/2025

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