Gabon : Verdict historique dans le procès judiciaire de la décennie, entre acquittements, peines lourdes et réparations financières
Libreville, Mardi 18 Novembre 2025 (Infos Gabon) – Ce mardi matin restera gravé dans les annales judiciaires du Gabon. La Cour criminelle spécialisée de Libreville a rendu son verdict dans un procès très suivi, impliquant dix coaccusés, dont l’issue a suscité à la fois soulagement, colère et espoir dans l’opinion publique.
Après une semaine de débats intenses, la justice a tranché, entre décisions allant de la relaxe totale à des peines de réclusion criminelle assorties d’importantes amendes, marquant une étape cruciale dans la lutte contre la corruption et la criminalité financière dans le pays.
Un verdict contrasté, reflet d’un procès aux enjeux majeurs
Le jugement de la cour a été marqué par une rupture notable avec ce que certains observateurs considèrent comme une tendance à la condamnation systématique. Ainsi, plusieurs accusés ont été relaxés ou ont vu leurs condamnations atténuées, tandis que d’autres ont écopé de peines exemplaires. La décision de la cour, après des débats qui ont duré plusieurs heures, a été accueillie avec une émotion contenue.
Parmi les verdicts, celui de Gisèle Mombo a suscité l’attention : elle a été reconnue coupable de blanchiment de capitaux. La justice l’a condamnée à 26 mois de prison, tout en lui laissant la liberté grâce à la levée de son mandat de dépôt, et lui imposant une amende de 5 millions de FCFA. Ce verdict intervient dans un contexte où sa liberté conditionnelle lui permet de recouvrer la liberté immédiate, mais la sanction financière reste une sanction symbolique forte.
Les peines lourdes pour les figures de la criminalité financière
Les jugements les plus sévères ont été réservés à plusieurs figures clés de cette affaire. Yann Ngoulou, considéré comme l’un des principaux acteurs, a été condamné à 15 ans de prison ferme, avec 5 ans de sursis, et une amende de 10 millions de FCFA. La même sanction a été prononcée à l’encontre de Mohamed Aliou Saliou, tandis qu’Abdul Oceni, également dans le viseur des juges, a été condamné dans la même proportion. Ces peines reflètent la gravité des faits qui leur sont reprochés : détournements, blanchiment d’argent et responsabilité dans un système opaque qui a gangréné l’économie nationale.
La cour n’a pas épargné Kim Oun, qui a été condamné à 5 ans de prison ferme et une amende de 50 millions de FCFA. Gabin Otha, lui, écope de 3 ans de prison, dont 1 avec sursis, ainsi qu’une amende de 5 millions de FCFA, et placé sous mandat de dépôt. La justice a voulu montrer sa fermeté face à des délits qui ont ensanglanté le tissu économique du pays.
Des condamnations intermédiaires et des relaxes
Certaines peines ont été plus modérées, notamment celle de Jessye Ella Ekogha qui devrait apparemment être épargné, mais “l’arrogance méthodique” a conduit les magistrats à le condamner à 10 ans de réclusion criminelle, dont 7 ans avec sursis, et une amende de 25 millions de FCFA, avec un mandat de dépôt.
Quant à Jordan Kamuset, il a bénéficié d’une peine plus clémente : trois ans de prison avec sursis, une amende de 5 millions de FCFA, et la levée de la résidence surveillée qui pesait sur lui depuis plusieurs mois.
Cyriaque Mvourandjami, autre acteur de cette affaire, a été condamné à 26 mois de prison, assortis d’une amende de 5 millions de FCFA. La cour a toutefois décidé de lever son mandat de dépôt et de procéder à la levée du gel de ses avoirs bancaires, dans une volonté de rétablir ses droits.
Confiscation et réparations : la justice passe aussi par la restitution
Au-delà des peines privatives de liberté, la justice a ordonné la confiscation de tous leurs biens, notamment véhicules et biens immobiliers, qui ont été listés publiquement lors de l’audience. Ces mesures se veulent dissuasives et exemplaires dans un contexte où la corruption a gangrené les institutions publiques. La cour a également imposé des réparations financières pour le préjudice causé à l’État, en ordonnant la confiscation des biens saisis lors de l’enquête en 2023.
Un contexte de regret et d’engagement
Les accusés ont tous, avant leur condamnation, présenté des excuses au peuple gabonais, exprimant leur repentance face aux accusations portées contre eux. Leurs avocats ont annoncé qu’ils allaient faire appel devant la Cour de cassation, espérant un revirement ou une réduction des sanctions.
Les débats, houleux, ont été marqués par des plaidoiries passionnées, notamment celles des avocats Boguikouima et ANDONG EMANE BITEGHE Morguiane, qui ont défendu bec et ongles leurs clients dans une atmosphère tendue. La cour a, pour sa part, rejeté la demande de certains accusés de bénéficier de peines plus clémentes, confirmant le sérieux de ses décisions.
Un verdict qui marque une étape dans la lutte contre la criminalité financière
Au final, la Cour a déclaré non coupable Steeve Nzegho Dieko, ancien Secrétaire général du Parti Démocratique Gabonais (PDG), de blanchiment d’argent, levant immédiatement toutes les mesures restrictives à son encontre, notamment la résidence surveillée et le gel de ses avoirs. Une décision qui confirme la volonté de la justice de distinguer les vrais responsables et de faire la lumière sur cette affaire complexe.
Ce verdict, lourd de symboles, marque une étape décisive dans la lutte contre la corruption au Gabon. Il témoigne de la volonté de la justice de faire respecter l’État de droit, dans un contexte où certains acteurs politiques et économiques cherchent encore à tirer leur épingle du jeu. La balle est désormais dans le camp des appelants, mais ce jour restera gravé dans la mémoire collective comme celui d’une justice qui, malgré ses lourdeurs et ses limites, tente de faire son devoir.
FIN/INFOSGABON/SO/2025
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