Economie

“Le Président de la transition vient de faire un bond extraordinaire en élevant le montant réservé à la PME gabonaise de 30 à 150 millions”, Jean de Dieu Ekwaghe Anzele.

Libreville, Mardi 31 Octobre 2023 (Infos Gabon) – Le Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI) a annoncé le 25 octobre 2023 l’attribution systématique des marchés publics d’un montant de moins de 150 millions de francs CFA aux PME et PMI gabonaises. Cette mesure, selon les nouvelles autorités, vise à booster l’entrepreneuriat local dans le sens qu’elle va donner une bouffée d’oxygène aux entreprises gabonaises.

Une décision largement commentée dans le milieu des PME. Pour certains, la promotion de l’homme d’affaires gabonais doit obéir à certaines règles, notamment la formation et le coaching. D’autres, même s’ils saluent la décision, ils estiment que c’est le code des marchés publics qui doit être revisité. C’est le cas de Jean de Dieu Ekwaghe Anzele, le Président de la confédération des PME gabonaises du secteur BTP. Il a répondu aux questions de notre rédaction.

Infos Gabon : Le Chef de l’Etat a signé un décret au profit des entrepreneurs nationaux, dans lequel les marches publics de moins de 150 millions de francs CFA sont réservés aux PME et PMI gabonaises. Pour les autotités, cette mesure favorisera le développement des PME locales. Partagez-vous cet avis ?

Jean de Dieu Ekwaghe Anzele : Je voudrais tout simplement féliciter et remercier le Président et son équipe qui ont pris cette décision d’élever le quota qui était réservé aux PME à l’époque de 30 millions et se voit aujourd’hui élever à 150 millions. Il vient de faire un bond extraordinaire. Il faut donc le concéder, bravo Mr le président, avec vous et toute votre équipe.

Cependant, une chose est de prendre la décision, une autre est de l’appliquer. Parce que ce que nous connaissons, ce que des décisions prises par le passé par nos chefs étaient parfois mal exécutées. Nous souhaitons que ça ne soit plus le cas et celle-ci soit profitable au plus grand nombre. Et dire également que nous sommes conscients que les dirigeants de la transition ont une tâche pas facile et que tout ne pourra se faire au même moment.

Déjà, la reforme institutionnelle amorcée mais il n’y a que ce pan avec la reforme du code électoral. A coté de ça nous avons le code des marchés publics et plusieurs autres codes comme celui des transports, du commerce, etc. Nous pensons qu’il serait important d’intégrer tout ceci pour une réécriture. Et pour parler spécifiquement du code des marchés publics, nous disons qu’il ne répond plus aux réalités actuelles.

Infos Gabon : A quel niveau estimez-vous que le code des marchés publics devrait être revisité ?

Jean de Dieu Ekwaghe Anzele : Sur tous les plans, dans la forme même il n’a pas été fait de façon à promouvoir la PME gabonaise. Si je prends le titre 3 de ce code qui parle du mode de passation des marchés publics en République gabonaise, il n’est pas conforme. A cela s’ajoute le titre 4 qui concerne la classification de contenus des marchés publics, là aussi nous pensons que pour classer les marchés publics, la loi 1/81 est claire et avec son décret 1024 stipule qu’il faut saucissonner (morceler ou diviser, ndlr) les marchés publics pour les rendre accessibles aux PME, je ne suis pas l’auteur de cette loi.

C’est pour toutes ces raisons que nous allons solliciter une audience auprès du président de la transition pour lui faire un état de lieu. A coté de tout ça il y a la question de l’exécution et du règlement des marchés. Nous disons que si le marché est mal exécuté, c’est celui qui exécute qui doit payer les sanctions et le contentieux. Si vous n’avez pas réalisé vos travaux, les dispositions des clauses vous emmènent à subir des sanctions.

Infos Gabon : Quelle est la responsabilité de ceux qui sont à l’origine de la mise en œuvre de ce code avec tout ce que vous relevez comme carences ?

Jean de Dieu Ekwaghe Anzele : Je ne porterai pas de jugement sur ces personnes, je ne suis pas l’autorité. Mais je vous dis que ce code qui a été fait par nos experts nationaux ne favorise pas l’éclosion de la PME, mais plutôt l’émergence des entreprises étrangères. C’est pourquoi je m’interroge sur la moralité de ces personnes qui ont conçu ce document. D’où, mon appel à procéder à la réécriture de celui-ci. Et je m’interroge également sur le montant de cent cinquante millions (150 000 000) s’il correspond à quel type de marchés publics ? Et pour quel type de PME ? Ces questions sont nécessaires. Si nous nous appuyons sur ce qui se fait ailleurs, ce montant correspond à une rubrique dans les marchés publics.

Nous apprécions l’élan du Chef de l’Etat, mais nous disons qu’il vaut mieux d’augmenter jusqu’à cinq cent millions (500 000 000). Parce que voyez-vous, nous avons des personnes qui ont une expertise dans notre domaine du bâtiment et travaux publics (BTP) de 20 à une quarantaine d’années, vous pensez que cette expérience doit être balayée d’un revers de la main parce que d’autres individus se disent “expertise” que nous n’avions pas ?

Nous sommes toutefois satisfaits de la rallonge que vient de nous accorder le président de la transition à qui nous demandons de faire confiance aux nationaux pour que nous puissions bâtir une économie solide et responsable.

Infos Gabon : Quels sont vos rapports avec le bureau de la Fédération Gabonaise des Entreprises (FGE) ?

Jean de Dieu Ekwaghe Anzele : Pour être claire, elles ne sont pas bonnes, pour vous dire nous n’avons pas les mêmes centres d’intérêts avec ceux qui cherchent les marchés des milliards et nous qui cherchons des marchés oscillant entre un million (1 000 000) et cinq cent millions (500 000 000). Vous comprenez bien que nos attentes sont différentes et nous estimons que ce groupement est un four tout.

Je rappelle à toute fin utile que dans tous les pays du monde il y a toujours une protection nationale et une préférence nationale loin d’être un xénophobe. Si je vous prends le cas du Sénégal où j’ai séjourné récemment. En sillonnant la ville, je vois un immeuble de près de 14 étages et là je me rend compte que l’entreprise chargée d’exécuter le marché était une Sénégalaise du nom d’entreprise Aboubacar, vous imaginez ce que cela apporte à l’économie du pays ? Et nous aurons moins de fuite des capitaux avec la préférence nationale.

Et aujourd’hui nous voulons maitriser l’économie de notre pays, imaginez ce qui se passe dans nos marchés à Mont Bouet, à Nkembo, à Louis, etc. C’est pourquoi nous préparons un mémorandum qui sera remis aux nouvelles autorités dans lequel on trouvera les propositions sur la régulation des transports terrestres, les artisans miniers, etc.

Infos Gabon : En conclusion, qu’est-ce qu’on peut retenir de tout ce que vous avez développé ?

Jean de Dieu Ekwaghe Anzele : Je finirai en disant tout simplement, quand on vous donne un peu, prenez d’abord et continuez de demander jusqu’à atteindre les objectifs que vous vous êtes fixés.

FIN/INFOSGABON/SM/2023

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