Marche des élèves au Gabon : Qui veut tirer les ficelles ?

Libreville, Mercredi 10 Avril 2019 (Infos Gabon) – Au moment où le gouvernement prend langue avec les principaux concernés, certaines personnalités animées par des calculs politiques dans la perspective de la présidentielle de 2023 tentent d’attiser le feu.
Doit-on se réjouir de voir les élèves dans la rue plutôt que dans les salles de classes en train d’acquérir le savoir ? Serait-on tenté de poser la question au regard de la déferlante de certains hommes politiques sur le dernier mouvement d’humeur des élèves des lycées et collèges gabonais remettant en cause les critères d’attribution des bourses aux bacheliers.
Devenus aphones et peu crédibles au sein de l’opinion depuis quelque temps, ces derniers ont pensé pouvoir s’engouffrer dans cette brèche pour revivre politiquement. Sur sa page Facebook, Jean Ping qui digère mal la débandade au sein de la Coalition nationale pour la République (CNR), consécutive au départ de Guy Nzouba Ndama, Alexandre Barro Chambrier, Zacharie Myboto et autre Jean Eyeghe Ndong, a cru bon de rebondir par un poste qui cache mal sa tentative de récupération de la manifestation.
«Je suis avec attention le cri de détresse des enfants de la Nation face à la situation plus critique que jamais de l’école de la République. Nous avons le devoir de les soutenir, de les porter, de les protéger», souligne-t-il.
De l’avis de certains, de quoi parle Ping, lui qui n’a pas su maîtriser la saignée dans ses propres rangs? Dans les rangs de la majorité, le candidat malheureux à la dernière élection présidentielle est repris par un cadre du Parti démocratique gabonais (PDG, au pouvoir).
«Comme d’habitude avec Jean Ping, on a de belles paroles mais aucune proposition concrète. Que propose-t-il pour améliorer le système des bourses ? Et d’une manière générale le secteur de l’éducation ? Rien, strictement rien ! Il se contente de faire de la politique politicienne», lance-t-il. Dans le monde universitaire, cette sortie est perçue comme une tentative de survie pour un homme politique qui accepte difficilement l’émergence d’autres figures politiques au sein de l’opposition.
«Jean Ping est dans une passe difficile. Il fait face à la montée en puissance d’autres figures de l’opposition, comme Guy Nzouba Ndama ou Alexandre Barro Chambrier, qui lui contesteront son leadership à l’occasion de l’élection présidentielle de 2023. Il est donc à la recherche d’appui pour rebondir. De ce point de vue, les marches d’élèves, organisées en réalité par les syndicats d’enseignants, est pour lui du pain béni », ajoute l’universitaire.
« C’est comme une personne qui se noierait et tenterait de se raccrocher à n’importe quelle branche sur son parcours. Mais il n’est pas sûr, compte tenu de sa faiblesse actuelle, que Jean Ping puisse réellement en profiter», commente un politologue.
Pour sa part, Alexandre Barro Chambrier, s’estimant devancé par son mentor d’hier dont il conteste désormais le leadership, va davantage se montrer plus virulent comme pour saluer ces évènements. «J’apporte tout mon soutien à cette jeunesse consciente et responsable, qui se bat pour défendre son droit à l’éducation (…) Devant ces événements qui dégénèrent en affrontements, j’invite instamment les pouvoirs publics, et particulièrement les forces de sécurité et de défense à faire montre du sens de responsabilité et de la nécessaire pondération face à nos jeunes compatriotes qui sont, avant tout, nos enfants», a souligné le président du Rassemblement pour la patrie et la modernité (RPM).
Un autre politologue trouve dans ces propos une volonté de positionnement pour 2023 de la part de leur auteur. «Dans l’opposition, on se met en ordre de bataille dans la perspective de 2023. Mais ses principales figures sont faibles. Elles ont donc besoin d’un appui extérieur pour relancer une dynamique. A cet égard, les marches d’élèves, que l’on sait largement organisées par les syndicats d’enseignants, sont pour elles une bonne opportunité de relancer la dynamique. D’où la course à l’échalote à laquelle se livrent Jean Ping, Alexandre Barro Chambrier et consorts. Mais il n’est pas sûr toutefois qu’elles y parviennent car l’opposition gabonaise est ressortie très affaiblie des dernières élections. A preuve, elle n’a pas su tirer profit ces derniers mois de l’absence d’Ali Bongo du pays suite à ses ennuis de santé», fait-il observer.
FIN/INFOSGABON/PM/2019
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