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Madagascar : le colonel Michaël Randrianirina prête serment comme président de la République

Libreville, Samedi 18 octobre 2025 (Infos Gabon) – Trois jours après la chute du président Andry Rajoelina, la Grande Île a officiellement tourné une page de son histoire politique. Le colonel Michaël Randrianirina, chef du Corps autonome des personnels et services administratifs et techniques (CAPSAT), a prêté serment vendredi à la Haute Cour constitutionnelle en qualité de président de la République de Madagascar.

La cérémonie solennelle, sobre mais hautement symbolique, s’est tenue dans la salle d’audience de la Haute Cour, en présence de plusieurs diplomates africains, occidentaux et représentants d’organisations internationales. En civil, sans galons militaires, le nouvel homme fort du pays a voulu signifier, par ce geste, son attachement à l’ordre institutionnel et sa volonté de rompre avec les schémas de coups d’État classiques.

« Je m’acquitterai pleinement, entièrement et équitablement des hautes responsabilités de ma fonction de président de la République de Madagascar », a-t-il déclaré, la main levée, devant les juges de la Haute Cour constitutionnelle.

Et d’ajouter : « Je jure d’exercer le pouvoir qui m’est confié et de consacrer toute mon énergie à défendre et à renforcer l’unité nationale, la paix et les droits de l’homme. »

Une transition sous le sceau de la refondation

Cette prestation de serment marque l’ouverture officielle d’une transition politique à Madagascar, dix jours après un soulèvement populaire inédit conduit par la « génération Z », puis rejoint par une partie de l’armée. Face à la colère sociale, la flambée du coût de la vie et la contestation grandissante de son autorité, Andry Rajoelina avait fui le pays, exfiltré par un avion militaire étranger vers un lieu tenu secret.

Le colonel Randrianirina, jusque-là discret, a émergé comme figure du consensus entre civils et militaires, promettant de « restaurer la confiance » entre l’État et la population, et d’engager « une refondation profonde » des institutions.

D’un coup d’État à une légitimation institutionnelle

L’ironie de l’histoire n’échappe à personne : le même homme qui avait aidé Rajoelina à accéder au pouvoir en 2009 est aujourd’hui celui qui l’a délogé. Mais contrairement à ses débuts tonitruants, le colonel Randrianirina semble vouloir éviter l’image d’un putschiste.

Lors de la cérémonie, il a pris soin de rappeler que son action n’avait « aucune visée personnelle », affirmant que son seul objectif était de « garantir la continuité de l’État ». Cette évolution de ton tranche avec ses premières déclarations, où il avait annoncé la dissolution de toutes les institutions. Devant la Haute Cour, il a rectifié.

« Nous respecterons la légalité. L’Assemblée nationale continuera à exercer son mandat. La Haute Cour constitutionnelle, garante de notre stabilité, demeurera le pilier de l’État de droit », a-t-il martelé.

Un contexte sous haute tension

Les manifestations qui ont conduit à la chute du régime Rajoelina étaient les plus massives depuis plus d’une décennie. Parties de simples rassemblements étudiants dénonçant la précarité et la corruption, elles ont pris une tournure nationale, mobilisant syndicats, ONG et même certains anciens ministres.

L’armée, refusant d’obéir à l’ordre présidentiel de répression, s’est finalement rangée du côté du peuple, scellant ainsi la chute pacifique du régime. Malgré l’absence de violences massives, la situation demeure fragile.

L’Union africaine a suspendu Madagascar de ses instances et exige un retour rapide à l’ordre constitutionnel. De son côté, la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) prépare l’envoi d’une mission de médiation.

Une transition placée sous observation

Le colonel-président Michaël Randrianirina a promis de ne pas confisquer le pouvoir, annonçant la tenue d’élections « libres et inclusives » dans un délai maximum de deux ans. Selon son entourage, un gouvernement de transition sera formé dans les prochains jours, composé de militaires, de technocrates et de représentants civils.

Cette phase s’annonce décisive pour un pays où les transitions se succèdent mais ne se ressemblent pas. Entre attentes populaires immenses et pressions internationales, le nouveau chef de l’État joue gros : il devra convaincre qu’un militaire peut préparer un retour crédible à la démocratie, sans dérive autoritaire ni confiscation du pouvoir.

Une île en quête d’un nouveau départ

En refermant le chapitre Rajoelina, Madagascar ouvre celui, incertain mais porteur d’espoir, de la refondation nationale. Les rues d’Antananarivo, encore marquées par des semaines d’agitation, ont retrouvé un calme précaire. Les drapeaux malgaches flottent, non plus en signe de défi, mais d’attente.

« Nous avons connu trop de promesses déçues. Cette fois, nous voulons un changement réel », a confié à la presse Frederico, une jeune juste après la cérémonie à la Haute Cour.

Pour beaucoup, le serment du colonel Randrianirina n’est pas seulement un acte de pouvoir, mais un engagement moral : celui de transformer une prise de pouvoir militaire en transition citoyenne, et peut-être, en renaissance politique.

FIN/INFOSGABON/SO/2025

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